Aujourd’hui, nous avons envie de vous faire découvrir une asso qui fait parler d’elle en ce moment sur les réseaux sociaux : La Cloche. Présente dans 8 villes en France, c’est concernant l’antenne de Lille que nous avons rencontré Sarah qui nous livre sa vision du bénévolat et son message sur l’inclusion des personnes sans-abris.
Bonjour Sarah, et merci de nous accorder un peu de temps pour nous faire découvrir La Cloche.
Avec plaisir, merci à Benenova Lille de nous donner la parole !
Peux-tu nous présenter l’association et nous dire quel est ton rôle à Lille ?
L’association La Cloche a été fondée en 2015 à Paris, et nous sommes présents à Lille depuis 2017. Le but de notre association est de changer les regards sur le monde de la rue, de mettre fin aux clichés qui touchent le public des sans-abris et créer du lien social, en proposant des actions avec et pour eux, comme par exemple des petits déjeuners, des ateliers cuisine… Je suis arrivée dans l’asso en tant que service civique pour 8 mois, et maintenant j’y travaille depuis un mois en tant que coordinatrice d’antenne. Au quotidien je gère l’administratif de l’asso, j’encadre nos services civiques, et je fais encore pas mal de terrain car ça me plaît vraiment d’être en contact avec nos bénévoles.
Quand tu dis bénévoles, tu parles de qui ?
En fait chez nous les bénévoles sont autant les sans abris que ceux qui viennent partager leur temps. Effectivement, d’un côté les sans abris bénéficient de notre aide, mais ils sont aussi acteurs et à ce titre ils sont considérés comme des bénévoles à part entière, sans distinction. Il y a d’ailleurs plus de la moitié de nos bénévoles qui viennent de la rue.
Et côté bénévoles qui ne bénéficient pas des actions, quel type de public rencontrez-vous ?
Le public est assez varié : cela va de l’étudiant au retraité, il y a aussi des actifs, des hommes et des femmes qui ont l’envie commune d’être acteurs de l’inclusion.
Il semble y avoir plusieurs dispositifs dans l’asso, tu peux nous en parler ?
Oui, il y a effectivement 3 dispositifs. Le premier historiquement c’est Le carillon. D’ailleurs nous sommes connus sous le nom le Carillon de Lille. C’est un réseau de commerçants solidaires qui proposent des services simples et gratuits accessibles à tous, notamment aux sans-abris : coup de téléphone, accès aux toilettes ou à une douche, recharge de téléphone, café…Des petits gestes qui changent considérablement la vie des personnes à la rue. Cela leur permet aussi de savoir qu’ils tomberont sur des commerçants bienveillants, qu’ils seront accueillis et pourront même discuter avec le commerçant si celui-ci est dispo. Il y a d’ailleurs un service « discussion » qui indique à quelles heures la personne se rend dispo aussi pour discuter, ce qui peut se faire pendant ou en dehors des heures d’ouverture, selon leur choix. Notre deuxième projet c’est Les clochettes. Là aussi, notre objectif c’est de créer du lien social, cette fois sur la thématique de l’embellissement urbain. Nous avons des bacs à fleurs que nous entretenons du côté de la friche à Saint Sauveur, et nous avons aussi des bacs à l’angle de l’avenue Gustave Delory. On y organise des petits déj chaque dernier dimanche du mois, où on évoque les actions, ce qu’on pourrait faire…C’est sympa car on peut entamer la discussion avec toute personne qui passerait sur sa route vers la boulangerie par exemple. Enfin, le 3ème dispositif, c’est La cloche à biscuit. Plus présent dans sa forme originale à Paris, il s’agit de chantiers de réinsertion, avec un dispositif très court (contrat de quelques heures), afin d’aider les personnes à remettre un premier pied à l’étrier avant de retrouver du travail. Les volontaires fabriquent des biscuits bio et les livrent à vélo chez les commerçants partenaires qui ensuite vont les revendre. A Lille on fait souvent des ateliers cuisine, à l’initiative des sans-abris. C’est un atelier où nos bénévoles cuisinent ensemble un plat avant de le déguster. Ce sont des plats proposés par nos bénévoles qui prennent ensuite en charge en partie ou totalement l’organisation et le déroulement de l’atelier. De la traditionnelle tartiflette au dahl de lentilles à la manière Sri Lankaise, les ateliers cuisine sont un formidable moyen de se découvrir, où la personne peut parler d’elle-même à travers un plat dont elle partage l’histoire et ses secrets avec les autres.
Quelle est d’après toi la spécificité de votre association ?
Notre démarcation par rapport à tout ce qui se fait auprès des sans-abris, comme par exemple les maraudes, c’est que nous ne faisons pas pour les personnes, mais avec elle. Bien sûr, l’état d’urgence dans lequel ils se trouvent nécessite qu’on leur apporte des choses, mais parfois les dispositifs de distribution ne leur permettent pas de discuter ou d’agir, alors qu’on voit qu’ils sont demandeurs sur le sujet. Alors au-delà de l’aide dont ils ont besoin, on est là pour aussi les inciter à être acteurs, à faire eux-mêmes pour eux. On met des choses à leur dispo, et c’est eux qui ensuite se mettent en action. Ça paraît bête mais, aujourd’hui, se faire un café, ça nous paraît banal, mais dans la rue, ce n’est pas quelque chose d’accessible.
C’est vrai, mais alors quand on y pense, c’est encore plus vrai sur les cours de cuisine…
Tout à fait ! Le plaisir de cuisiner pour quelqu’un, partager non seulement un repas mais sa préparation…Ce sont des gestes du quotidien pour nous et on ne réalise pas à quel point pour d’autres c’est une chance qu’ils n’ont pas tous les jours.
Et qu’est-ce qui te marque le plus dans ton expérience au sein de La Cloche ?
Je dirais que ce qui me touche le plus, c’est de voir l’évolution des personnes. Certaines personnes venaient à la base comme ça, ne parlaient pas trop, et aujourd’hui, elles se sont plus ouvertes, elles sont force de proposition, se responsabilisent. C’est là que notre action prend tout son sens.
Qu’attends-tu du partenariat avec Benenova Lille ?
Nos actions visent à sensibiliser les habitants et mettre fin aux clichés sur les sans-abris. Grâce à Benenova, nous allons pouvoir toucher de nouvelles personnes, et si ce sont pour des actions ponctuelles, ce n’est pas grave parce qu’au contraire, cela peut nous permettre de toucher plus de monde, et que chacun puisse avoir la possibilité de discuter avec nos bénévoles, de découvrir toute la richesse des personnes de la rue, que ce sont des personnes capables. C’est une belle opportunité.
Finalement, chez Benenova et La Cloche, on a en commun de croire en la force de ces petites actions, le « pouvoir d’agir » de chacun.
Tout à fait ! Tout le monde peut agir à son échelle. On ne se rend pas compte mais une simple discussion avec une personne de son quartier ou de sa ville, ça peut déjà faire beaucoup !
Parlons un peu de la vidéo sortie il y a peu « Casting Paul, 60 ans ». Cela a été fait à Paris, mais je suppose que ça parle aussi de vos réalités. La vidéo a pas mal tourné…tu sais s’il y a eu beaucoup de répercussions ?
Oui effectivement cela a été fait à Paris, mais les problématiques que rencontrent ces personnes sont les mêmes qu’à Lille, je pense notamment à un bénévole qui nous a dit qu’on a refusé de lui donner à manger en maraude, parce qu’il était trop bien habillé, il pouvait pas être à la rue…. C’est bien parce que cette vidéo est traitée avec humour mais au fond elle interpelle énormément sur les clichés. Je n’ai pas trop idée des répercussions mais apparemment à Bordeaux TV7 a relayé le sujet et les a interviewés. Toute la campagne est relayée sur la page Facebook La Cloche, que je vous invite à suivre, car il y a beaucoup de contenu sur ce qu’on fait, mais aussi des podcasts pour changer son regard sur la rue… c’est vraiment intéressant ! Puis bien sûr, vous pouvez rester en contact avec notre antenne via la page Le Carillon de Lille !
Merci Sarah pour toutes ces informations, et à bientôt, lors d’une prochaine action Benenova avec La Cloche !
Merci à vous !